Le Centre Georges Pompidou

Le Centre Georges Pompidou

Triptyque Rossellini

Beaubourg expose à son Tour

En 1977,Roberto Rossellini filmait l’ouverture du centre Pompidou. La Ferme du Buisson, en Seine-et-Marne, montre ses images de visiteurs circonspects et d’autres oeuvres inspirées par lui.

Si l’on souhaite revivre les débuts de Beaubourg, poumon culturel hérité de l’ère pompidolienne implanté au coeur de Paris entre les Halles et le Marais, il faut se rendre à… Noisiel, en Seine-et-Marne.
La Ferme du Buisson, pour fêter les 40 ans du centre Pompidou, a choisi un prisme original : le film réalisé par le pape du néoréalisme italien, Roberto Rossellini, à l’ouverture du musée.

Voir ses entrailles

En 1977, Beaubourg ressemble au Beaubourg que l’on connaît, les filtres sécuritaires en moins et les vraies standardistes en plus. Le portrait du président Pompidou par Vasarely orne déjà l’entrée. Plus étonnant, c’est un musée d’art moderne qui commence en 1900, avec Gustave Moreau, Paul Gauguin, le Douanier Rousseau ou Odilon Redon. La force du documentaire de Rossellini, fidèle au néoréalisme qui sort du studio pour aller dans la rue, est d’attraper au vol cette fibre populaire.

«suppositoire en acier»

Dans une petite pièce cachée, on découvre en outre sa Dream Machine, drôle de cylindre rotatif troué avec une ampoule au milieu. Il faut s’en approcher les yeux fermés et, soudain, des nappes de brouillard rouges et bleus surgissent comme dans une hallucination.
La Dream Machine, une des premières pièces achetées par Beaubourg, devient une métaphore du centre, véritable «machine à rêves» seventies. Pourtant, à ses débuts, c’est un cauchemar pour certains.

Dans une interview, il s’emporte

«Cela me fâche, cette mythification de l’artiste. Avant, c’était des serviteurs de la société.»

Avant, c’était des serviteurs de la société.» D’autres créateurs complètent sa vision. Gordon Matta-Clark, qui voulait creuser Beaubourg en construction, se rabat sur les immeubles alentour, défonce des murs et filme son action. Tandis que Brion Gysin, ami de William Burroughs résidant au 135 rue Saint-Martin, juste en face du centre, le photographie depuis sa fenêtre. Utilisant la pellicule comme le rouleau d’un peintre, il juxtapose les vues de ses planchescontacts et crée des grilles de photos couleur. Grâce à cette technique de collage d’images, le centre Pompidou n’en apparaît que plus tentaculaire, bâtiment industriel donnant à voir ses entrailles de tuyauterie.

«Un édifice pareil me semble vraiment monstrueux», dit l’un. «Ah ben, monsieur, on en a des plombiers! » s’exclame l’autre, «Je ne comprends pas qu’on ait mis un suppositoire en acier inoxydable sous le nez de la Joconde!»

Outre l’acquisition des archives Rossellini, la Fondation Genesium annonce l’accueil des archives d’André Delvaux et de Paul Meyer. Dans le cas de Meyer, ces documents concernent notamment l’émigration italienne dans le Borinage.

La Fondation, qui se profile déjà dans le calendrier de Mons 2015 (capitale européenne de la culture), est déjà en pourparlers avec les Fonds Jerry Lewis, Alain Delon, William Friedkin et André Masson.
A suivre.

La Dream Machine, une des premières pièces achetées par Beaubourg, devient une métaphore du centre, véritable «machine à rêves» seventies. Pourtant, à ses débuts, c’est un cauchemar pour certains.
Clémentine Mercier